Vous avez rejoint le groupe ORPEA en tout début d’année en tant que Directeur de l’éthique médicale, pouvez-vous nous faire un premier retour d’expérience ?
Emmanuel Hirsch : Dès mes premières rencontres sur le terrain avec les professionnels mais également avec les personnes accueillies dans les établissements et leurs proches, j’ai compris que le groupe ORPEA est soucieux de réflexion et d’engagements éthiques. Les circonstances doivent cependant nous inciter à être humbles dans ce domaine, attentifs à faire vivre cette culture de la sollicitude, de la bienveillance et de la solidarité auprès de personnes si souvent en situation de vulnérabilité dans la maladie, le handicap ou le grand âge. Assumer nos responsabilités relève d’une exigence de compétence, de disponibilité, de capacité d’écoute dans un environnement humain sensible où sont engagées les valeurs essentielles de la vie démocratique. Nous sommes attendus dans cette capacité d’être à la hauteur, d’être dignes de la confiance qui nous est faite. Et c’est au quotidien, dans le cadre de pratiques respectueuses de la personne et du bien commun que nous attestons des valeurs dont nous sommes individuellement et collectivement comptables. Premier retour d’expérience, je suis convaincu que dans le renouveau d’ORPEA l’attention éthique est reconnue comme une composante indispensable de l’identité du groupe, et c’est ensemble que l’on doit témoigner d’une implication exemplaire au service de ceux qui sollicitent nos soins.
« Faire vivre cette culture de la sollicitude, de la bienveillance et de la solidarité auprès de personnes si souvent en situation de vulnérabilité dans la maladie, le handicap ou le grand âge. »
Selon vous, comment pourrait-on définir l’éthique dans le cadre des missions d’ORPEA ?
E. H. : J’évoquais les principes de notre démarche éthique : elle se développe dans le cadre de concertations, de rencontres, de partages d’expériences et d’expertises initiées au plus près du terrain. Depuis quelques mois nous avons recueilli les points de vue, les propositions, les attentes et même les urgences. Les personnes qui vivent dans nos établissements ou sont suivies à leur domicile aspirent à bénéficier des soins et des accompagnements certes les plus adaptés mais dans un environnement respectueux de ce qu’elles sont, de leurs choix, de leur sphère privée et de leur place reconnue dans la société. Il en est de même pour leurs proches eux aussi demandeurs d’hospitalité, de considération et de sollicitude. Les professionnels eux-mêmes éprouvent le besoin d’une bienveillance à leur égard, d’une juste appréciation des enjeux et des difficultés de l’exercice de missions complexes dans un contexte d’extrêmes fragilités. Quant à la société, elle doit comprendre que des choix politiques et de nouvelles formes de solidarité s’imposent afin de ne pas exclure du champ social des personnes au motif de leur incompatibilité avec un idéal qui rejette ceux qui ne semblent pas conformes au modèle du moment.
Dans nos établissements nous sommes hospitaliers aux personnes affectées par des maladies mentales, les séquelles de traumatismes, des maladies évolutives parfois jusqu’à leur stade terminal, de pertes d’autonomie voire de capacités cognitives qui les rendent plus dépendantes que d’autres. Notre éthique s’exprime donc dans un devoir de non-abandon, une ouverture à l’autre en des circonstances existentielles souvent redoutables. Tout dans nos missions ne peut que nous inviter à la réflexion éthique, à mieux saisir le sens et la finalité de nos actions et à mettre en œuvre une éthique pratique, une éthique de l’engagement. Il ne s’agit pas d’être prescriptif mais de partager une intelligence du réel qui favorise une intervention pertinente, juste, préoccupée de ce à quoi la personne est attachée.
« Notre éthique s’exprime dans un devoir de non-abandon, une ouverture à l’autre en des circonstances existentielles souvent redoutables. Tout dans nos missions ne peut que nous inviter à la réflexion éthique, à mieux saisir le sens et la finalité de nos actions et à mettre en œuvre une éthique pratique, une éthique de l’engagement. »
Justement, quelle est la mission du Conseil d’orientation éthique au sein de la Direction médicale ?
E. H. : Nous reviendrons une prochaine fois sur la structuration du dispositif éthique qui va se déployer au sein d’ORPEA. Toutefois j’évoquerai comme vous le souhaitez le Conseil d’orientation éthique du groupe (COE) qui en constitue l’axe central dans son ouverture nationale et internationale. Il ne s’agit pas d’un comité d’éthique ou d’un espace éthique mais d’une instance de concertation et de consultation associant la diversité des compétences et des expertises à l’orientation de la démarche éthique du groupe. Sa gouvernance et son mode d’intervention seront présentés sur le site par souci de transparence. En fait il s’agit de la base du réseau éthique que nous constituons dans une perspective de démocratie en santé et dans le médico-social. Les membres du collège du COE (internes ou externes au groupe) ont répondu à une sollicitation qui a été largement diffusée. À la suite de rencontres personnalisées, nous sommes convenus de leur intérêt à contribuer à notre démarche dans un esprit de pluralisme et d’ouverture sur la société. Dès février 2023 nous engagerons un travail approfondi à propos de 3 thématiques, dont l’une est en phase avec l’actualité puisqu’elle concerne la Convention citoyenne sur la fin de vie. Nous publierons également un document réunissant une cinquantaine de contributions : « L’éthique avec vous et pour vous».
« Il ne s’agit pas de philosopher à distance de l’immédiat mais d’incarner et de défendre sur le terrain les valeurs de dignité, de respect, de bienveillance et de justice au cœur du vivre ensemble. »
Dans les semaines qui viennent nous mettrons progressivement en place notre démarche éthique, en phase avec la dynamique de transformation soutenue par chacun au sein du groupe. Notre objectif est de contribuer, à notre juste place, à la vocation et aux missions d’ORPEA, celles dont nos professionnels assument la responsabilité auprès des personnes qu’ils accueillent et qu’ils accompagnent dans leur vie. Elles sont en droit, comme leurs proches, d’exiger de notre part une exemplarité.
Vous l’avez compris la culture éthique d’ORPEA doit être riche et forte de l’engagement de chacun. Il ne s’agit pas de philosopher à distance de l’immédiat mais d’incarner et de défendre sur le terrain les valeurs de dignité, de respect, de bienveillance et de justice au cœur du vivre ensemble. Je vous parlerai la prochaine fois de l’instance qui va se mettre en place en en région ; la Cellule de concertation, de veille et de vigilance éthique. Il nous fait être proactifs, veiller, anticiper, dialoguer afin d’apporter les éclairages et si nécessaires les mesures nécessaires à cette alliance en éthique, cette forme d’encordage dans une aventure au cœur du soin et de l’accompagnement, au service du bien commun.
Merci Emmanuel Hirsch !